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Cela vous a peut-être échappé si vous n’êtes pas insomniaque, chômeur ou les deux comme moi : la Coupe du monde de rugby 2021 débutait ce week-end ! Après avoir été le premier sport à n’autoriser que les passes vers l’arrière, le rugby innove encore en organisant une compétition dans le passé.
On ne va pas se mentir, quand il s’agit du mondial féminin, on fait en général tous la même chose : on oublie de regarder. Jusqu’au moment où l’on retrouve la télécommande qui s’était mystérieusement perdue dans un recoin du canapé, juste à temps pour la demi-finale que les Françaises vont perdre de façon rageante contre l’Angleterre. Et c’est bien dommage. Car comme chez les mecs, la phase de poule, c’est le meilleur moment. C’est celui où vous allez pouvoir vibrer en regardant de véritables amatrices, qui, pendant 4 ans, ont sacrifié une partie de leur vie personnelle et professionnelle pour accomplir un rêve idiot : jouer une Coupe du monde, et essayer d’aller chercher « l’essai de l’honneur » au cours d’un match qui sera très probablement perdu sur le score de 70-5.
À l’époque du sport business, des contrats d’images, des publicités, des dirigeants corrompus et des NFT, le voilà notre îlot de fraîcheur, d’innocence et de pureté : se lever à 5h du mat pour voir une boulangère fidjienne mettre un raffut à une professionnelle anglaise. C’est simple, si vous ne mettez pas votre réveil, c’est juste que vous n’aimez pas le rugby.

Et bien sûr, l’autre intérêt de cette compétition, c’est que la France peut ramener la coupe à la maison ! Peut-être plus que jamais. Voyez par vous-même : une année 2022 médiocre sur le plan du jeu, un changement de coach à quelques semaines du Mondial, une défaite contre l’Italie en match de préparation, des compositions d’équipes qui changent tout le temps, des joueuses cadres écartées, une septiste qui fait une Jean-Marc Doussain en intégrant le groupe avec 0 sélection… Si vous connaissez un peu le rugby français, vous savez qu’il y a là un terreau fertile pour planter la graine du French Flair (si vous n’avez pas compris l’allusion subtile, ce terreau, c’est de la merde).
Mais avant de rêver à d’hypothétiques exploits et à une revanche contre l’Angleterre qu’on attend depuis trop longtemps, il faut commencer par le début, et un match d’ouverture contre l’Afrique du Sud, qui jouait sa première Coupe du monde depuis 8 ans. Et cette fois, les Boks n’étaient pas écartés d’une compétition à cause du racisme d’État. Non, juste parce qu’ils étaient nuls.
La compo des Bleues

Le film du match
Vous l’aurez compris, chez les meufs, l’Afrique du Sud n’est pas exactement une nation majeure de l’Ovalie (si vous vous demandez pourquoi, cet article pourrait vous éclairer). Mais cela ne les empêche pas d’être terrifiantes. On parle quand même d’un pays où chaque habitant consomme environ 1 kilos de protéines par jour, et ça se voit chez les avants des Women Springbok, qui ressemblent à des guerrières-camionneuses sorties tout droit de Mad Max. Par conséquent, les premiers impacts sont rudes, surtout pour Caroline Drouin qui se fait bien secouer sur son premier ballon.


Côté français, on a aussi quelques arguments quand il s’agit de retourner de la viande, avec Madoussou Fall ou Romane Ménager.

Sans oublier l’éternelle Marjorie Mayans, qui a encore pris soin d’alimenter sa compile YouTube « biggest hits » et qui est définitivement la meuf avec qui vous n’avez pas envie d’être relou en soirée, de peur de finir la tête écrasée contre le bar.

Le début de match des Bleues est plutôt sérieux et appliqué, et on ne tarde pas à se rapprocher de l’en-but sudaf. C’est le moment choisi par Laure Sansus pour donner raison à tous les journalistes paresseux qui l’appellent « la Antoine Dupont du rugby féminin ». Il faut reconnaître que les deux possèdent la même particularité : on sait exactement ce qu’ils vont faire et quand ils vont le faire. Et pourtant, on arrive pas à les empêcher de le faire. Derrière un ballon porté, la N°9 toulousaine profite d’une défense un peu naïve pour prendre le trou, 7-0.

On comprend que les Françaises ont la même envie que moi devant la télé : en finir au plus vite pour aller se recoucher. Après Sansus, c’est l’autre moitié de la charnière qui brille, avec Drouin qui adresse un petit coup de pied astucieux par dessus la défense. Gabrielle Vernier saisit la balle au bond et termine le travail en effaçant l’arrière sudaf comme la Fédération Française de rugby efface les sanctions infligées au MHR. 12-0.

Même si les Sud-Africaines sont solides physiquement, volontaires et agressives dans les rucks, on les sent bien limitées dès qu’il faut attraper le ballon et essayer d’en faire quelque chose. Bref, elles sont « valeureuses » comme on dit quand on masque mal sa condescendance. Pourtant, les Boks sont parfois capables de créer des occasions d’essais. La preuve avec une belle passe de la demi de mêlée Talya Kinsey en plein dans les bras d’Émilie Boulard, qui nous fait une spéciale Damian Penaud, « je me mets bien au milieu de la ligne de passe adverse, j’attends, je saute, et voilà ». Ça a l’air facile. Probablement parce que ça l’est.

19-0 après 17 minutes de jeu, ça fait plus d’un point par minute, statistiquement c’est difficile de faire mieux. On se dit alors que l’Afrique du Sud va nous offrir un score comme seuls leurs voisins namibiens arrivent à nous délivrer en Coupe du monde masculine. Hélas, c’est le moment où les Bleues vont se relâcher, et nous offrir un best-of de tout ce qu’elles ont fait de pire en 2022 : conquête défaillante, manque d’agressivité dans les rucks, passes dans le vide, indiscipline.
Même après l’expulsion temporaire de la troisième ligne Solontsi, les Françaises ne parviennent pas à mettre en place leur jeu, et l’on en reste sur ce score à la pause. On pourrait s’en inquiéter. Personnellement, je suis serein : on aurait dit un match de poule de l’équipe de France de Marc Lièvremont lors de la Coupe du monde 2011, déjà en Nouvelle-Zélande. Donc logiquement, ça sent bon la finale.

Au retour des vestiaires, les Springbokettes réalisent sans doute qu’il y a la place pour ébranler cette équipe de France si imprécise. Dominantes en mêlée, elles commencent à trouver quelques failles dans le jeu courant et, après une longue période de domination, l’ailière Mabenge va marquer en coin. 19-5.

Plus que l’essai, c’est peut-être la scène qui suit qui vaut le coup d’œil. Les Sud-Africaines exultent, se prennent dans les bras. On voit même une remplaçante se prendre la tête dans les mains et pleurer sur le bord de la touche. Marquer un essai contre la France, c’était un peu gagner leur Coupe du monde. Et ça c’est beau ! C’est autre chose que Cameron Woki qui fait un gros « chut » aux caméras pour régler ses comptes avec on ne sait qui, ou Antoine Dupont qui n’a plus célébré un essai depuis 3 ans parce que pour lui, cet évènement est devenu aussi banal que tirer la chasse après être passé aux toilettes. Je vous le dis, il est là le vrai rugby !

Bon par contre, la tentative de transformation, ce n’est pas vraiment du rugby, mais on peut pas tout avoir.

On attend la réaction des troupes de Thomas Darracq. Elle tarde un peu à venir, la faute à un jeu de ligne qui ne ressemble toujours à rien : on a l’impression de voir un orchestre symphonique essayer de jouer un morceau de Jul, rien n’a de sens.

Caroline Drouin est à la sieste, la paire de centres a l’air de s’être rencontrée à l’aéroport il y a une semaine, les ailières font ce qu’elles peuvent avec les roquettes qu’on leur envoie au visage toutes les 10 minutes.

Bref, c’est le bordel, et quand c’est le bordel, la patronne s’énerve. Après une séquence qui parvient tout de même à emmener les Bleues jusqu’aux 22 mètres, Laure « j’ai pas le temps pour ces conneries » Sansus s’empare du ballon, joue vite une pénalité et va marquer en se faufilant dans ce qui ne ressemblait pourtant pas du tout à un intervalle. Mais les intervalles, c’est Laure Sansus qui décide s’ils existent ou pas. 26-5, le bonus offensif est enfin sécurisé à la 68e minute, on a failli attendre.

Heureusement, le réveil des troupes semble avoir sonné. Romane Ménager, qui aura fait mal sur ses percussions toute la matinée, nous offre une nouvelle chevauchée et parvient à passer les bras pour Drouin, qui vient de se souvenir qu’elle jouait ce match et qui va conclure avec facilité. 31-5.

Preuve que Drouin est une vraie Grandisse à la française, elle est capable de disparaître pendant 60 minutes puis de nous émerveiller avec des gestes classieux. Après une charge de l’autre bulldozer français, Madoussou Fall, la Bretonne perce et réalise une passe au pied dans un timing impossible pour offrir son premier essai en Bleu à Joanna Grisez. 41 à 5, score final.

Sur le contenu, on peut rester un peu sur notre faim, certes. Mais il ne faut pas oublier que les Françaises se sont préparées pour une compétition, qui, dans la plus grande tradition des Coupes du monde de rugby, va durer 2 mois. Comme au Tour de France, le pic de forme est donc sûrement prévu pour la haute montagne.

Une montagne qui va arriver plus vite que prévue avec le choc contre l’Angleterre, samedi prochain, à 9h cette fois, merci pour notre sommeil. Un match qu’on espère de tout cœur perdre. Si on a une carte French Flair à jouer et un exploit à faire, il faut le garder pour la demie ou la finale. Alors, j’ose le dire, même si je risque la déchéance de nationalité : allez les Red Roses !
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